_P.O.S.#2_performance

[2022-2023]




Conception de la performance : Collectif MOUVEMENT(s)
Performeur·se·s :  Thomas BENHAMOU - Malvina BOMPART - Christian DACLINAT - Aimée DUBUISSON - Corinne DUTHEIL - David GONGUI - Fanny INGRASSIA - Didier MARTINEAU - Baky MEGUENNI - Nathalie HERVE - SPIRALE PRODUCTION - Alice ROLAND
Création sonore : Fanny INGRASSIA – Benoit NAVARRET - Antje LHERY
Création lumière : Némo A. GAULON  Costumes : Gemeureuses du Groupe d’Entraide Mutuelle Les Envolées

Partenaires :

Université Paris 8 Saint-Denis, Laboratoire MUSIDANSE, ArTec, Banque populaire -Rives de Paris, Agir! In Seine-Saint-Denis

Le P.O.S. [Plan d’Occupation des Sols] est un dispositif performatif nomade imaginé par le collectif MOUVEMENT(s).
Initialement, un Plan d’Occupation des Sols est un document cartographique dressé par les services d’urbanisme d’une commune. Il arrêtait les règles d’utilisation de son sol, découpant notamment ceux-ci en plusieurs zones distinctes ayant chacune une affectation dominante. La notion d’occupation renvoie aussi directement à une prise de possession temporaire d’un espace, elle contient en filigrane une volonté de réappropriation et rappelle ce que les activistes américain·es appellent « reclaim », se réapproprier non pas une position d’autorité mais la capacité de sortir de l’impuissance, de résister à ce qui l’a fabriquée.
Le P.O.S. prend la forme d’une déambulation dansée et guidée par les membres du collectif MOUVEMENT(s) dans tous les espaces de la structure-hôte qui l’accueille. Il se transforme et se déploie en fonction du lieu qui l’accueille. Dispositif chorégraphique, éditorial et sonore, Il cartographie de manière sensible un discours à plusieurs voix sur la psychiatrie et propose de créer des zones de concertations dansées ou activées par la lecture, chacune animée par un désir de renouer avec la fonction hospitalière du lieu.
En juin 2022, il s’est installé une première fois dans les espaces du théâtre Louis Aragon à Tremblay-en-France. En mai 2023, le P.O.S. #2 s’est déployé dans le lieu où tout a commencé : le CHI Robert Ballanger à Aulnay-sous-Bois et a proposé cette fois d’agir directement sur site en s’adressant en premier lieu à tous ses habitant·es.




12.04.2023 - discussion collective - CHI Robert Ballanger 



Marina : L’idée est d’écrire un texte sur le projet du P.O.S. #2 pour le conseil départemental et j’aimerais le faire avec vous. Comment le présenter ce nouveau P.O.S. à l’hôpital ?
Didier : C’est pas dans le même espace, ce nouveau P.O.S. a lieu à l’hôpital, ce qui change beaucoup de choses et notamment de nouvelles zones peut-être plus dures que celles proposées au théâtre Louis Aragon.
Marina : Que veux-tu dire par « plus dures » ?
Didier : Rien que l’endroit déjà, le théâtre est un endroit lisse, adapté pour la danse. Ici c’est quand même un sacré bordel. C’est pas carré ici, c’est des racines partout, un sol déformé…
Christian : Oui je suis d’accord, ça relève du défi ce P.O.S.#2, ça se passe à l’hôpital et on a tous une certaine idée de ce lieu et danser dans l’hôpital c’est un défi pour moi.
Aimée : A part la salle de spectacles, tous les autres espaces sont pas destinés à accueillir des gens qui dansent. Les aspérités du sol.
Corinne : la lumière aussi, on aura pas la lumière tamisée du TLA.
Didier : C’est pas un endroit pour la culture de manière générale, mais un endroit pour accueillir des bureaux, de l’administratif.
Christian : Et du soin aussi.
Aimée : Et vous avez quand même l’impression qu’il est toujours question de soin dans ce P.O.S#2 ?
Christian : Pour moi la danse c’est une thérapie, c’est déjà un autre soin donc oui pour moi il est toujours question de soin.
Alice : Oui j’ai l’impression qu’on met en avant avec les espaces qu’on a choisi des lieux qui sont moins mis en avant par l’hôpital, je pense à cette zone des-équilibré·es ou des racines, ou encore l’ancien terrain de basket. Finalement des espaces dont on sait pas trop bien quelle est son utilisation au quotidien.

Corinne : Des espaces qui ont été abandonnés finalement, dont plus personne ne prend soin. Quand on voit le banc devant la psy A par exemple, il est complètement rouillé et affaissé.
Fabrice : A l’époque, on jouait sur le terrain de tennis, on faisait plein de trucs. C’est abandonné aujourd’hui. Et c’est des lieux de passage en réalité qui sont très occupés, en tout cas par les gens hospitalisés. J’ai jamais compris pourquoi ils avaient tout laissé comme ça.  

Marina : Pour le POS 1, ce qui était beaucoup ressorti dans nos échanges c’est que c’était un partage d’expériences, partager avec un public une certaine
 expérience de la psychiatrie. Est-ce toujours le cas pour ce P.O.S.#2 ?
Didier : Je me souviens quand on a monté la tempête de Shakespeare avec le GEM, les toubibs étaient étonnés qu’on retienne autant de texte (rires). C’est aussi montrer autre chose de nous.
Marina : Il y a une adresse aux soignants ?
Christian : Oui, ils vont voir autre chose de nous, quelque chose qu’on a choisit de montrer.  
Corinne : Pour moi c’est une adresse aux collègues, aux personnes encore hospitalisées, en fait à toutes les personnes du pôle d’ailleurs. Montrer ce qu’on peut partager ensemble et quelles initiatives on peut porter en le faisant ensemble.
Marina : Si je comprends bien, j’entends davantage un désir de transformation, transformation du regard, des relations, du lieu…
Christian : Oui clairement, transformer en apportant autre chose dans le lieu.
Corinne : Oui et s’approprier les lieux, les revisiter.
Aimée : Pour moi c’est aussi donner de nouvelles significations au lieu.
Fabrice : Oui le lieu peut avoir plein de significations différentes.
Aimée : Ce qui est particulier c’est que pour le P.O.S.#2 il est question de parler de l’hôpital dans l’hôpital alors qu’au théâtre on parlait de l’hôpital mais en dehors.
Marina : Mais est-ce qu’on parle de l’hôpital ou on agit sur lui ?
Christian : Pour moi, c’est montrer qu’on est pas qu’une maladie, qu’on peut faire des choses ensemble, donc qu’on peut agir.  
Didier : Oui, c’est insupportable d’entendre les journalistes toujours nous enterrer un peu plus.
Corinne : C’est peut-être aussi une manière de se réconcilier avec le lieu ?
Christian : Je ne sais pas si c’est possible. plutôt se réconciler avec son histoire, son vécu, en transformant le lieu.
Marina : On est davantage dans l’action dans le sens où on cherche finalement à imaginer des actions qui vont sortir le lieu de sa routine parfois mortifère. Faire en sorte qu’il s’y passe autre chose.
Didier : j’espère quand même qu’il y aura aussi quelques personnes de l’extérieur.
Fabrice : Moi c’est la première fois du coup pour moi que je vais performer. Mais pour moi depuis que je suis arrivé dans le collectif, c’est comme un bain duquel on veut plus sortir, l’eau est plus ou moins chaude mais on est quand même bien dedans (rires).
Didier : Ce qui m’embête c’est que tout le monde ne va pas pouvoir sortir des services d’hospi ce jour-là. J’espère qu’on trouvera des complices ce jour là pour ouvrir quelques portes.